Nous sommes des "pêcheurs d'images".

[J-C]

Et oui, je pense que nous sommes des "pêcheurs d'images". Il y a bien la chasse à l'image, mais en ce qu'il nous concerne, c'est bien de la pêche dont on se rapproche le plus. Et de la pêche au gros en mer.
C'est en faisant une séance mouvementée au marais d'Orx que je me suis fait cette réflexion. J'étais en train de me battre avec le vent et mon cerf-volant comme on bataille avec un gros poisson. Et vas-y que je tire... il faut lâcher du mou. Et vas-y que je fait semblant de me laisser faire, et puis en fourbe je remonte le vent pour passer au delà du cervoliste... il faut rapidement "avaler" de la ligne et essayer d'empêcher le matos de toucher terre. Et je fais des tours dans le ciel (c'est la première fois que je vois le Calomil faire des boucles !). Et je tire comme un bourrin à la limite de la rupture... juste pour montrer que rien n'est acquis.
Qui ose dire que le cerf-volant, et plus encore l'aérophotographie sous cerf-volant ce n'est pas du sport ? Bien sûr que c'est sportif ! Et c'est surtout une discipline de sang froid. Je ne sais plus très bien combien de fois, cet après-midi, j'ai du ramener le matériel au sol, le refaire décoller... Et tout ça au bord d'une route pas trop fréquentée, heureusement, mais dans un espace de manoeuvre assez réduit et entouré d'eau. Autant de sources de stress à gérer. Comme la pêche sportive en mer.
Qui n'a jamais dit en mettant en l'air son cerf-volant : "là je suis monté trop fin... c'est limite." A quoi ressemble-t-on finalement avec notre rouleau à ficelle ? Quelle sensibilité à la tension de la ligne nous développons. Trop de mou... trop tendu... Attention, il faut que j'en lâche un peu sinon je vais me faire piéger. On sent la ligne, le cerf-volant et le vent... sans même les regarder.
Et quand la ligne est en l'air... on part à la pêche... au gré du vent. A la pêche aux surprises. Que ce soit en autokap, en radio commandé, avec ou sans retour vidéo, on n'est jamais sûr du résultat. Mieux, on ne voit pas forcément le reflet qui magnifier une photo, le cadrage peu typique qui rend une certaine dynamique à la photo. Comme à la pêche, on peut ramener de beaux spécimens comme du menu fretin...

Alors oui, je pense que nous sommes des pêcheurs d'images. Je tenais à vous faire part de cette modeste réflexion.

A+
JC pêcheur d'images, et rêveur à ses heures...

[Emmanuel]

Je trouve que c'est un très beau texte, qui me parle.
C'est vrai que l'autokap, c'est un peu la pêche à l'épuisette (ou au chalut, c'est selon), la RC, je la verrais plutôt du côté de la pêche à la mouche.
Mais l'essentiel à mes yeux, c'est qu'après notre passage, les poissons nagent encore ;o)

PS : ton texte, je le verrais volontiers dans une revue trimestrielle d'un Club de cerf-volant...

[J-C]

Je suis d'accord. D'autant plus si d'autres pêcheurs complètent le propos.

A+
JC

[ormes]

J'adhère totalement à cette image de la pêche, et elle me trotte dans la tête à chaque sortie, mais avec quelques nuances. D'abord, j'utilise essentiellement des deltas, pour leur facilité de mise en œuvre, leur polyvalence, et le fait qu'ils ne tirent pas beaucoup (tout en gardant une bonne capacité à lever). Je me rends compte que, petit à petit, j'en suis même venu à choisir le plus petit delta utilisable en fonction du vent. Ma nacelle est simplissime, s'oriente manuellement au sol, et le photoscope a un intervallomètre. Le cerf-volant est rapidement dans les airs, où il semble flotter paisiblement dès qu'il y trouve son équilibre. La nacelle suit, et, à son retour, il est exceptionnel que je regarde le résultat sur place, me réservant ce plaisir, et la surprise, pour le retour à la maison. Si la « nasse à images » est vide, c'est aussi la promesse d'une nouvelle balade, et d'un bon moment.
L'analogie avec la pêche tient donc, pour moi, surtout à ce côté aléatoire, et parfois surprenant (la pêche miraculeuse). Plus qu'un combat à la Hemingway, j'y vois la récolte des poissons volants sur le pont du Joshua de Moitessier, au petit matin, comme une manne. Je pense aussi à ces journées de gamins passées au bord de l'eau, armés d'une branche de noisetier, d'une ligne improbable que la moindre ablette un peu délurée aurait repérée avant même qu'elle soit dans l'eau, d'un hameçon artisanal sur lequel on pouvait embrocher un ver sacrifié, un bout de pain ou une noisette (oui, j'ai pêché à la noisette, et ça ne marche pas très bien). On ne rentrait jamais bredouilles, il y avait toujours une belle journée passée dehors, à rêver, et des prises hypothétiques, certes, manquées, bien sûr, mais extraordinaires et qui ne perdaient rien pour attendre. Je retrouve ça le nez levé, en regardant le cerf-volant glisser dans les nuages, en marchant un peu pour m'approcher de ce que je crois être le bon angle, en m'asseyant dans l'herbe, rompu par un tel effort, ou en soufflant sur mes doigts gelés. Et quelquefois, une ablette un peu délurée, un peu sentimentale aussi, décide de faire plaisir aux gamins.
S'il s'agissait de pêche au filet, je penserais plutôt à l'épervier. On y retrouve la nécessité de repérer, un peu, les poissons avant de lancer, le côté malgré tout aléatoire du résultat et une certaine élégance du geste que je rapproche de celle qu'on peut retrouver en lançant un cerf-volant dans un souffle, et en le ramenant du bout des doigts.
Que celui qui n'a jamais pêché me jette la première bière.
Pascal, pêcheur de lune matinal

[André]

C'est vraiment une appellation qui me plaisait beaucoup, il y a quelques années. D'autant qu'on opérait en argentique et que l'on avait parfois aucune idée de ce que l'on allait trouver sur la pellicule.
Jetter l'hameçon en l'air, lâcher de la ligne et espèrer la grosse prise. Puis patience, patience... une photo toutes les minutes... 12, 24 ou 36 poses... compter pour pas ramener trop tôt, avant que ça morde. Rapporter le tout à la maison, trouver le temps de développer la pellicule ( si elle était finie et dans le cas contraire, prévoir, vite, une autre séance pour la griller complètement car fallait pas déconner : ça coûtait quand même des sous ). Puis jeter un œil sur le négatif encore mouillé et ressortir du labo plein d'espoir sur ce que l'on a entraperçu... avant d'y retourner pour les tirages.
Parfois ça avait mordu... et parfois non.
Et comme pour les pêcheurs, avec l'expérience, on arrive à cerner de mieux en mieux ce que l'on va pêcher. On arrive à orienter correctement sa nacelle, gérer son altitude et avoir une idée plus ou moins précise de ce que l'on va rapporter à la maison ( avec un gros coup de main depuis l'apparition du numérique ).
C'est vraiment un titre qui m'aurait bien tenté pour un site ou un blog... mais voilà : Plisson nous a doublé !
Et pourtant, s'il y a une pratique photographique qui se rapproche le plus de la pêche, c'est bien la notre...

[Wirth]

Lors d'une séance kap au milieu du mois de Mars au bord du lac de Séchemailles , j'ai eu l'occasion de vérifier l'analogie entre les pêcheurs à la ligne et les ''pêcheurs d'images '' que nous sommes sans le moindre doute .
En même temps que je m'ingéniais à placer mon Cody dans les meilleures conditions de prises de vue possibles , déroulant ou enroulant de la ligne , je regardais du coin de l'oeil 2 pêcheurs à la ligne . Portant des cuissardes à bretelles ils pêchaient dans le lac à une trentaine de mètres de la rive , l'eau leur arrivant à la taille . Des habitués certainement , connaissant très bien le lac .
Je me demandais ce à quoi ils pouvaient bien penser en me voyant '' mouliner en force '' , comme un pêcheur au gros .
J'en souris encore aujourd'hui en y repensant .
J'ai bien essayé de les '' attrapper à l'apn '' , mais je n'ai pas réussi (ma nacelle n'a pas de servo de tilt , et le servo de pan ne tourne que sur 90° ).
Les 2 pêcheurs étaient encore dans l'eau quand je suis parti , et je n'ai donc pas pu engager la conversation avec eux .Dommage .
J.C , ton texte est très agréable à lire et je pense comme Emmanuel qu'il pourrait tout a fait être publié .
On se reconnait bien dans ce texte , mais aussi dans les vôtres Ormes et André .
Allez , demain s'il fait beau , j'irai à la pêche
A+ Michel

[J-C]

Donc nous sommes bien des "pêcheurs d'images". Autant de méthodes de prises de vue, autant de styles de pêche. De la plus sportive à la plus passive, de la plus sophistiquée à la plus élémentaire...
Et puis Plisson n'a validé qu'un nom d'entreprise qui est plus précisément "Galerie Pêcheur d'images"... mais bon, il n'a pas le monopole de l'étiquette. Puis quand bien même nous ne jouons pas sur le même tableau, ni sur la concurrence. Mais il est vrai qu'on peut difficilement créer un site appelé Pêcheurs d'Images... quoique, le nom est disponible... Plisson ne l'a pas réservé (le titre de son livre est surtout un effet de style, vu qu'il est tout seul...).

Ceci étant, pour revenir à notre causerie, je suis tombé sur ceci fortuitement sur une de mes sites favoris :
http://30joursdebd.com/2010/01/12/les-plus-hautes-profondeurs/

A+
JC

[ormes]

Magnifique et très poétique !

[seve]

hé hé ! Quasi au sens propre !

[J-C]

Quelle belle prise ! C'est renversant !

A+
JC

[ormes]

L'humour est aussi une forme de poésie. Joli coup Severine.